nights in white satin ♡ nana

Elle a les pieds qui pendent dans le vide et le corps étalé sur le lit comme une masse  - l'air de dire, regarde je suis une vraie poupée merde, j'ai pas fait mon vernis. amal n'a plus peur du monstre sous le lit, quand on est petit ce qui fait peur c'est de savoir qu'il n'existe pas, mais qu'il pourrait potentiellement exister ( rien n'est sur, l'inconnu ne cesse d'effrayer). une fois qu'on l'a rencontré, c'est plus simple. une histoire de pilule coincée dans la gorge et d'actes manquées. les regrets sont comme des voyages qui forment la jeunesse, adieu tendresse. à l'époque, elle aurait du l'abattre avant qu'il ne manque de la dévorer. d'un jour à l'autre elle était trop faible ou trop appliquée à suivre la justice des choses. persuadée qu'il existait un bien et un mal.  elle  continue de tromper son monde amal, à faire comme-ci la jeune fille sensible et naïve s'était définitivement rhabillée, mais c'est à croire qu'elle a pas assez souffert pour avoir vraiment besoin de s'en débarrasser. elle continue de rire tendrement de la violence de sa jumelle, devant son miroir, démone aux lèvres de sang. la seule chose de vraie à la télévision  que le rouge va bien aux femmes.
Elle se dit toujours qu'à la prochaine balle, elle arrêtera d'essayer, qu'elle ne laissera plus le masque tomber - question de fiété. Puis elle traverse sa peau, le sang et les larmes se mêlent à l'alcool et elle échoué dans ces draps comme la seule destination qui lui soit véritablement connue. de toute façon, elle n'a lui nulle part ailleurs où aller. là même les plus belles promesses sont oubliées - elle se rend compte que la plupart sont vaines. rester c'est la plus belle chose qu'elle ait jamais fait, s'attarder encore en tenue d’Ève entre l'étude approfondie du plafond et la personne qui habite la maison.
nana. qui est-tu nana, une drôle de nana, drôle de dame.
amal elle ne la comprend pas, elle s'intéresse et fait mine de comprendre tout ce qu'on lui raconte mais ça ne rentre pas. alors nana a toujours été nana, peut être ce qu'il ou ele est vraiment et si il est encore question d'un il ou d'un elle. c'est nana, quoi. et c'est plus simple comme ça. et elle s'en fous amal du reste, elle s'en branle vraiment. nana c'est une personne merveilleuse et elle est contente d'être son petit chat.
t'as pas une clope, j'ai envie de fumer pour me détendre.
amal, elle évite de trop se faire d'idées aussi. parce que même si elle adore nana, elle s'en ira, c'est comme ça. parce que peut-être que dans quelques mètres elle rencontra le quatorzième amour de sa vie. et c'est pas qu'elle est fleur bleue ni qu'elle a le cœur d'artichaut  - elle l'a amande amère.  c'est qu'elle ne sait pas choisit et dire non quand on lui propose. de toute façon, nana n'en fait pas cas.
la seule chose que nana n'aime pas c'est quand elle revient avec une cicatrice de plus. apparemment ça a son importance. amal, ça fait longtemps qu'elle compte plus.
sur la cuisse, sur l'omoplate. sur la poitrine des coups de couteaux - et même la douleur ne fait plus mal. et même le bonheur ne fait plus bien. et même le vide ne fait plus rien.

amal candeur, amal chaleur, amal qui vient d'ailleurs. amal souffle dans la nuque, un uppercut. amal qui s'immisce, amal qui bouge sous les draps en serpent sous son tas de sable. amal au rire de caucase et aux frissons délicieux - la façon dont se cambre sa colonne vertébrale, dont chaque os se compte sur le bout des ongles. amal qui se contorsionne, amal le bonbon acidulé qui laisse son amertume sous la langue - amal contre son ventre, à l'intérieur de ses cuisses, à lui tenir les cheveux, à se taire. cavalcade des soupirs, incitation au désir - éphémère. nana aux accessoires laissés à l'arrière, sans visage teinté cette fois, sans rouge sur les lèvres, sans bleus sous les yeux - nana qui revient à la banalité, qui revient aux origines de sa propre déité. admiration discrète, secrète pour la déesse martelée, terminée à la cigarette et à la violence gratuite - offerte sur un plateau d'argent. elle dont la seule occupation est de garder les portes du neotic bien ouvertes ou bien fermées, de jeter les ordures sur lesquelles il préfère cracher. amal dont les vices se perdent, dont les vices se tatouent à même sa chair - et nana qui, encore une fois, se remet à compter, frôlant à peine les marques définitives aux histoires consécutives. nana en tailleurs, qui fait bouger ses omoplates, les fait un peu craquer - fatigue soudaine de l'acte consommé.
- hmmm. ouais sans doute. qui se penche, qui ouvre la table de chevet pour y trouver un paquet bien vide, bien écrasé, l'autre à moitié plein - tout dépend du point de vue. il le sort, le tend, briquet en prime en dedans, représentant un chiot à moitié arraché par l'usure. j'sais plus où j'en étais. faut qu'je recommence. nana qui pousse un soupir, à peine surjoué, feignant l'amusement pour dissimuler l'inquiétude - un quotidien sans amal qui ne serait qu'une supercherie. la peur de se réveiller, de se dire, que dans cette fatale finalité, elle n'aurait jamais existé.
- bouge pas.
il se penche, reprend son comptage, commence par les bras, attentif à chaque morceau qu'il aurait raté. passe sur sa clavicule, sa poitrine - touche, frôle, le jugement éteint, seulement l'artiste qui laisse l'oeuvre l'impressionner.
- j'ai l'impression de faire du dessin en points. une ligne, puis une autre... ça va former quoi tu crois ? hm ? couteau ? cadavre ? pistolet ? un truc cubiste ? et nana qui oublie parfois les sons qui s'échappent de sa bouche, un peu de japon qui trahit les r, un peu de l'avant qui refait surface.